Le Coscen


La commission d’enquête sur les essais aériens de l’Assemblée de la Polynésie française (août 2005 – janvier 2006) a permis de briser le silence sur les essais des institutions tant à Paris qu’en Polynésie.

Après la publication du rapport de l’APF, le Conseil d’orientation sur le suivi des conséquences des essais nucléaires (Coscen) a travaillé à la mise en œuvre des recommandations de l’Assemblée.

Depuis février 2006, le « suivi des essais nucléaires » est devenu un objectif incontournable, ponctué par les événements et actions résumés ci-après :

• une proposition de résolution déposée par le groupe socialiste du Sénat demandant la création d’une commission d’enquête sur les conséquences sanitaires et environnementales des essais nucléaires en Polynésie (mars 2006)

• une proposition de loi déposée par le groupe socialiste à l’Assemblée nationale visant à la reconnaissance et à l’indemnisation des personnes victimes des essais ou accidents nucléaires (avril 2006)

• l’organisation d’un colloque international sur les aspects sanitaires, environnementaux et politiques des essais nucléaires dans les locaux de la Présidence de la Polynésie française (juin 2006)

• l’inauguration à Papeete d’un monument à la mémoire de toutes les victimes des essais nucléaires dans le Pacifique (juillet 2006)

• les déplacements « sur commande » à Tahiti du Délégué à la sûreté nucléaire de Défense, M. Jurien de la Gravière, à cinq reprises (entre octobre 2005 et novembre 2006) pour défendre la thèse officielle des « essais propres » ou « presque propres » devant les élus et la population polynésienne,

• le vote à l’unanimité des membres du Conseil Economique, Social et Culturel de la Polynésie d’un rapport sur la responsabilité de l’Etat dans les conséquences des essais nucléaires (novembre 2006),

• l’interpellation au Sénat par Mme Hélène Luc de Mme Alliot-Marie, ministre de la Défense, sur les conséquences des essais nucléaires qui annonce l’accès - sous restriction - aux archives des essais nucléaires jusque-là fermées pour 60 ans (novembre 2006),

• le financement sur le budget de la défense 2007 d’opérations de « destruction réhabilitation » prévues sur plusieurs années d’anciens sites du Centre d’Expérimentation du Pacifique abandonnés par les militaires dans les îles et atolls proches de Moruroa et aujourd’hui en ruines,

• l’annonce de la part du ministère de la Défense de la mise à disposition de la Polynésie de moyens humains et matériels pour assurer le suivi sanitaire des populations polynésiennes proches des anciens sites d’essais et des anciens travailleurs polynésiens de Moruroa,

• l’organisation d’un colloque sur les conséquences des essais nucléaires à Alger, sous l’impulsion du gouvernement d’Algérie, les 13 et 14 février 2007.


Ainsi en quelques mois, par l’action du Conseil d’orientation, au nom de la Polynésie française, l’état d’esprit des responsables de l’Etat et du ministère de la Défense a évolué notablement et on constate une volonté réelle de Paris pour résoudre le contentieux des essais nucléaires avec les institutions et les représentants de la société polynésienne.

Le gouvernement de M. Tong Sang qui a pris la présidence de la Polynésie fin décembre 2006, s’est peu intéressé au suivi des essais nucléaires et, s’il y a eu quelques réunions du Coscen, on y a seulement « expédié les affaires courantes ». En mars avril 2007, deux représentants du Pays ont pu participer à la mission de surveillance de Moruroa, conformément aux demandes faites en décembre 2006. MM Guillaume Ratte et Claude Serra, du ministère de l’environnement se sont rendus disponibles pour cette mission. La question du suivi médical des anciens travailleurs de Moruroa et des populations des îles proches de Moruroa a été négociée avec le Délégué à la sûreté nucléaire de défense par le gouvernement Tong Sang. Contrairement à ce qui avait été proposé par le gouvernement précédent, un Centre de suivi médical a été créé par une convention Etat-Polynésie française qui confie ce suivi à des médecins militaires.

Le gouvernement Temaru qui a repris la présidence de la Polynésie en septembre 2007 a permis de relancer des réunions régulières du Coscen pour assurer le suivi des actions engagées précédemment, notamment le programme de restauration des anciens sites du CEP et la mise en place du suivi médical engagés par le ministère de la Défense. Un projet de création de délégation pour le suivi des conséquences des essais a été débattu au ministère de la santé, les textes ont été finalisés, mais, en raison de l’instabilité politique, l’arrêté de création n’a pas été validé en Conseil des ministres. L’objectif de la délégation était de soustraire le suivi des conséquences des essais nucléaires aux aléas politiques polynésiens. Depuis la fin de l’année 2007, le Coscen a reformulé le projet « Mémoire des essais nucléaires » qui faisait partie des recommandations de la Commission d’enquête de l’Assemblée de la Polynésie. La chute du gouvernement UDSP en avril 2008 a mis fin provisoirement à ce projet qui a été repris – d’une certaine manière dans ce « Mémorial virtuel – par M. Oscar Temaru devenu Président de l’Assemblée de la Polynésie.

Sous les gouvernements UPLD et UDSP, le Coscen a fonctionné comme l’interface entre la Polynésie française et le représentant du ministère de la Défense, M. Jurien de la Gravière. L’objectif du Coscen a été de faire mettre en application les recommandations de la Commission d’enquête de l’Assemblée de la Polynésie. Il s’agissait essentiellement de faire valoir les intérêts de la Polynésie française en réparation de 30 ans d’essais nucléaires. Ceci explique que les relations du Coscen avec M. Jurien de la Gravière n’ont jamais été simples, parfois houleuses et occasionnellement orageuses.

Sous les gouvernements de M. Gaston Tong Sang, le Coscen n’a pas réellement fonctionné. Les orientations proposées lors des gouvernements précédents ont été laissées à la « bonne volonté » des représentants de l’Etat qui ont agi en fonction de leurs seuls intérêts. Ainsi, le « suivi sanitaire » des essais nucléaires a été dévolu au ministère de la Défense, qui, après avoir eu la responsabilité du programme d’essais nucléaires, dispose aujourd’hui de la maîtrise des conséquences sanitaires de ce programme. De plus, les « réhabilitations » dans les îles proches de Moruroa ont surtout consisté à « effacer les traces » trop visibles de la période des essais nucléaires. Enfin, la « sécurisation » et les mesures de « restauration radiologique » de Moruroa et Fangataufa ont été occultées et laissées aux soins de l’Etat et des Armées.




© Copyright 2009 Assemblée de la Polynésie française   | Mentions légales