Etat des lieux après les essais.
Après la fin des essais aériens, de nombreuses infrastructures du CEP ont été transférées progressivement de Hao sur Moruroa.
La « base arrière » s’est vidée de son personnel et les bâtiments ont été détruits ou laissés à l’abandon. En 1996, la base aérienne de Hao ne comptait plus que 150 militaires.
Dès l'annonce du démantèlement des sites d'essais sur Moruroa et Fangataufa, les autorités militaires ont annoncé que, désormais, la base militaire de Hao serait renforcée et passerait entre 1996 et 1998 à 400 militaires. De nombreux matériels et bâtiments sauvés de la destruction de Moruroa ont alors été transférés sur Hao. Les autorités militaires ont présenté la mission de la base interarmées de Hao dont la tâche essentielle consistera en la maintenance de la piste d'aviation par une unité de l'armée de l'air.
A partir de 1998, Hao abrita deux sections de travaux du 5ème Régiment de la Légion Etrangère chargées principalement d'effectuer des grands chantiers pour la Polynésie et de soutenir la base de Moruroa qui ne comptait qu’une section de 30 hommes de la Légion. On y installa aussi une petite unité du Service Militaire Adapté.
Malgré ce renforcement récent de la base, un an plus tard, le ministère de la défense annonça que la base interarmées de Hao serait fermée à compter du 1er août 2000. Le coût de l'entretien de la base militaire se montait à 1 milliard de Fcfp par an et ce coût était déduit du montant annuel des compensations versées par la France à la Polynésie dans le cadre de la convention "après-
CEP". Mécontent de cette « ponction », le Président Flosse négocia avec le ministère de la défense pour que le montant de l'entretien de Hao soit récupéré au profit du budget du Territoire en contrepartie de la fermeture de la base. La piste d'aviation, désormais surdimensionnée, fut transférée à l'aviation civile et entrait désormais sur la voie du déclin (Voir document « Manureva Magazine, 4ème trimestre 2000).
Les conséquences de ces restructurations militaires, commencées dès 1975, frappèrent de plein fouet l’emploi et les ressources locales. La population d’Otepa et sa municipalité se retrouvèrent, non seulement sans ressources, mais avec le fardeau des bâtiments abandonnés ou en ruines enserrant le village. Les « retombées » économiques de la base interarmées, aux dimensions réduites, leur furent retirées au profit du gouffre sans fond du budget du Territoire.
Dès 1995, l’état environnemental de Hao fut mis en accusation par un dossier d’Annie Rousseau dans l’éphémère hebdomadaire « L’Echo de Tahiti nui » sous le titre provocateur « Hao : l’atoll du paradis contaminé », en même temps que Bruno Barrillot consacrait un chapitre sur Hao dans son premier livre sur les essais
« Les essais nucléaires français 1960-1996) ». Mais ces cris d’alarme retombèrent vite dans l’oubli. Il fallut attendre 2005 et la Commission d’enquête de l’Assemblée de la Polynésie sur les essais nucléaires aériens pour que le pitoyable état des lieux de l’atoll de Hao soit enfin décrit et dénoncé.
En octobre 2005, la Commission d’enquête était accompagnée des experts de la Commission de Recherche et d’Information Indépendante sur la Radioactivité (Criirad) dont les précieux apports scientifiques ont été annexés au Rapport « Les Polynésiens et les essais nucléaires ». S’il fallait résumer l’état d’esprit des membres de la Commission à leur retour de Hao, les mots « révolte » et « tristesse » en seraient l’exacte traduction. Et, comble de mépris, quelques semaines après la publication du rapport de la Commission, le Délégué à la sûreté nucléaire de Défense, M. Jurien de la Gravière, déclarait aux Nouvelles de Tahiti que
« cet atoll a fait l’objet d’une mise en état extrêmement correcte en l’an 2000 ». Il accusait même la population d’Otepa, reprenant des propos du maire, d’avoir contribué au délabrement de l’atoll !
Le point de vue polynésien n’étant guère écouté du côté du ministère de la Défense, il fallut faire appel aux médias. Une équipe d’« Envoyé Spécial », la célèbre émission de France 2, vint sur place et le reportage évocateur « Hao, l’atoll oublié », diffusé en octobre 2006 alors que M. Jurien de la Gravière était présent à Tahiti, fut le levier qui obligea les représentants de l’Etat à bouger.
Dans les semaines qui suivirent la diffusion du reportage, le ministère de la défense donnait les détails de sa très rapide expertise radiologique de Hao en 1999 et 2000 et quelques informations chiffrées sur les rejets de déchets radioactifs au large de la passe « Kaki ». Le conseil d’orientation pour le suivi des conséquences des essais nucléaires (Coscen) prit alors le relais : la réhabilitation de Hao fut inscrite par le ministère de la Défense dans le programme des réhabilitations des anciennes implantations du
CEP. Le 8 janvier 2009, deux conventions furent signées et les travaux de nettoyage de Hao, annoncés pour démarrer en avril 2009, sont prévus pour une durée de sept ans…