Quelles réparations ?


Le 19 janvier 2002, Moruroa e tatou et l’Aven organisaient au Sénat, à Paris, une conférence internationale sur « les essais nucléaires et la santé ».

C’était un événement car presque tous les pays où avaient eu lieu des essais nucléaires avaient envoyé un conférencier. Les médias furent très nombreux et la conférence eut un grand retentissement d’autant que deux députées – Marie-Hélène Aubert et Michèle Rivasi – déposèrent le lendemain une proposition de loi sur les conséquences sanitaires et environnementales des essais nucléaires français. Mais ce fut également la première fois qu’à Paris, on parlait de Tureia.

Le discours émouvant du Pasteur Taaroanui Maraea interpella les médias et, le temps de convaincre leurs patrons, une équipe de France 2 autour de Pascal Martin entreprit le tournage d’un reportage sur les conséquences des essais nucléaires en Polynésie. Un déplacement à Tureia fut même organisé : le troublant silence sur Tureia au temps des essais nucléaires allait prendre fin. Tout juste, cependant, car le reportage de France 2 « Dans le secret du Paradis » fut programmé en 2004 à une heure très tardive en métropole et jamais diffusé par RFO Polynésie ! Mais le courant médiatique était passé. L’année suivante, la célèbre émission Thalassa dépêchait Sophie Bontemps et son équipe à Tureia et, en septembre 2005, « Le cancer du Tropique » était diffusé sur les deux chaînes publiques de RFO Polynésie.

Quelques semaines plus tôt, la Commission d’enquête de l’Assemblée de la Polynésie sur les essais nucléaires avait commencé ses travaux et ses auditions. Une courte visite à Tureia de trois membres de la Commission accompagnés des experts de la Criirad a été rendue possible grâce au soutien du Président Oscar Temaru. Celui-ci autorisa l’avion présidentiel à effectuer l’aller-retour entre Totegegie et Tureia avec un nombre limité de passagers, la piste de Tureia ne permettant pas l’accès de cet avion à pleine charge. Le rapport de la Commission consacre un chapitre entier à Tureia sur lequel prit appui, le moment venu, le programme de « réhabilitations » engagé par le ministère de la défense.

Prévus en novembre 2006, les travaux de réhabilitation à Tureia ont commencé en janvier 2009. Auparavant, le Conseil d’orientation pour le suivi des conséquences des essais nucléaires (Coscen) avait recueilli les souhaits des habitants de Tureia et des documents précis ont été transmis au Délégué à la sûreté nucléaire de défense. Des habitants de Tureia ont même été invités à participer à des rencontres de concertation avec les représentants de l’Etat. De fait, le « courant » passait très mal entre d’un côté les familles et la municipalité de Tureia et les représentants de l’Etat. Le traumatisme de la période des essais nucléaires reste très vivace à Tureia et les autorités militaires et de l’Etat n’en ont pas pris la vraie mesure. La destruction des deux blockhaus, mesure jugée prioritaire par le ministère de la Défense, ne se fera vraisemblablement pas tant les passions contradictoires se sont exacerbées.


Tureia restera la « mal aimée » de ceux qui, aujourd’hui, ont pris le relais du CEP. Les responsabilités de cet échec sont peut-être partagées. D’une part, l’instabilité gouvernementale de la Polynésie n’a pas permis l’accompagnement serein et régulier d’une population de Tureia encore traumatisée. D’autre part, les représentants de l’Etat n’ont su voir que les destructions destinées à « effacer les traces des essais nucléaires » et ils n’ont pas perçu qu’il fallait « reconstruire la confiance » dans les esprits des hommes et des femmes de Tureia par des actions « généreuses » au profit de cette petite communauté.



 Glossaire

Mot 
  • CEP
  • Centre d’expérimentation du Pacifique


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Citez les cinq présidents de la République qui ont autorisé des essais nucléaires ?



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