En contrepoint. « A chacun ses femmes » !
Jusqu’à une période récente, le monde militaire, principalement impliqué dans les programmes d’essais nucléaires, était essentiellement masculin. Ce n’est pas l’objet du « Mémorial virtuel » de faire une étude sur les « femmes et l’armée » ! Néanmoins, quelques faits méritent – avec une dose d’humour – d’être soulignés.
Les géographes, mais aussi de nombreux observateurs, sont étonnés par tous ces noms féminins qui désignent les sites principaux du pourtour de Moruroa. Ces appellations n’ont aucune origine polynésienne, elles sont le fruit des fantasmes des personnels de la Marine nationale chargés de cartographier l’atoll avant qu’il ne devienne « l’atoll de l’atome ».
Les traditions ont une grande importance dans la Marine nationale – la « Royale » - : l’image de la vahine de la Nouvelle Cythère est restée très vivace dans les relations entre la marine et la Polynésie. Aux temps de l’ « armada nucléaire » qui faisait escale à Tahiti pour les essais, la femme polynésienne était la danseuse - ou le groupe de danseuses - qu’on invitait à bord comme au temps des Bougainville et autres « découvreurs » européens. Les jeunes marins sevrés de présence féminine pendant les semaines de traversées, revivaient le temps d’une escale, le mythe polynésien… avant de poursuivre vers des expériences plus mortifères.
Le sénateur Daniel Millaud, avec humour, aime à rappeler ses visites sur invitations officielles à Moruroa :
« Je ne me souviens pas exactement de la date, mais nous n’avons pas assisté à un essai. J’ai seulement le souvenir que, pendant qu’on nous servait l’apéritif, plusieurs jeunes femmes, métropolitaines, se sont baignées dans le lagon. » Alex du Prel, le directeur de la revue Tahiti Pacifique Magazine, a immortalisé ce genre de scène qui vaut son pesant de propagande !
Avant le passage « au civil » de la surveillance radiologique de la Polynésie française (hors Moruroa et Fangataufa), le ministère de la Défense publiait un rapport annuel sur l’état radiologique de la Polynésie. En 1994, le rapport mentionne « pour mémoire » que la valeur de « l’irradiation ambiante » où la valeur la plus basse est celle de l’atoll de Mururoa et que celle de la Bretagne a une valeur « correspondant à six fois l’irradiation ambiante de Mururoa ». L’illustration de ces propos « rassurants » utilise une jeune et souriante vahine photographiée par un célèbre photographe de Tahiti qui, par ailleurs signa une magnifique brochure de propagande sur le thème « Mururoa Club Med ».
Et s’il fallait un dernier mot. Le mythe de la vahine a aussi inspiré les artistes militants de la cause antinucléaire !