Les victimes devant la justice


Avant la création des associations Aven et Moruroa e tatou, plusieurs anciens militaires ont engagé individuellement des procédures devant la justice pour faire admettre le lien entre leur maladie et leur présence sur les sites d’essais nucléaires. Ils n’ont jamais obtenu justice.

Dès 2002, avec l’appui d’un cabinet d’avocats spécialisé dans les maladies professionnelles, la défense des victimes civiles et militaires a pris de la cohérence. Non seulement, près de 400 dossiers sont en cours, mais plusieurs procédures ont été gagnées définitivement après tous les appels, demandes d’expertises et de contre-expertises du ministère de la Défense.

Le 28 novembre 2003, les associations Aven et Moruroa e tatou ont déposé une plainte contre X en se portant parties civiles devant le tribunal de grande instance de Paris. En quatre ans, les deux juges d’instruction du Pôle santé du Parquet de Paris n’ont toujours pas bouclé leur dossier. Comme l’objectif de cette procédure est de désigner les responsables des délits suivants, ainsi libellés « abstention délictueuse, administration de substances nuisibles ayant porté atteinte à l’intégrité physique ou psychique d’autrui, atteinte à l’intégrité physique » et d’obliger l’Etat à créer un fonds d’indemnisation des victimes des essais nucléaires, on peut supposer que les juges attendent que l’Etat se « dénonce » de lui-même.

En avril 2008, au tribunal du travail de Papeete, débutait le premier marathon judiciaire pour huit anciens travailleurs de Moruroa atteints de divers cancers du sang, cinq d’entre eux étant déjà décédés. Après six renvois dus au retard des avocats du ministère de la Défense, du CEA et des entreprises, l’audience de plaidoiries en première instance aura lieu le 16 mars 2009.

Le 27 novembre 2008, lors du débat sur la proposition de loi Taubira à l’Assemblée Nationale, le ministre de la Défense Hervé Morin a promis de « ne plus faire appel systématiquement » lorsqu’une instance judiciaire aura reconnu le bien-fondé de la demande d’une victime. De fait, la « générosité » de l’Etat n’est qu’apparente car, de plus en plus, l’Etat est condamné à indemniser les victimes de ses essais nucléaires, y compris dans les plus hautes juridictions. Il s’agit aussi, pour le ministère de la Défense, d’éviter de se trouver confronté à des juridictions internationales, telle la Cour Européenne des Droits de l’Homme, position qui n’est guère confortable pour l’image que la France veut donner d’elle-même.


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