Incidences sanitaires à Maralinga : des cobayes humains
Les incidences sanitaires et environnementales des essais nucléaires sont l’un des héritages permanents du colonialisme dans le Pacifique.
De même que pour les expérimentations américaines et françaises, le personnel militaire et civil des sites d’expérimentations nucléaires britanniques en Australie et dans le Pacifique a été confronté à de nombreux dangers.
Les militaires ont été exposés à des doses d’irradiation à plusieurs reprises, même si le gouvernement continue de soutenir que le montant des doses reçues n’a pas eu d’effet majeur sur la santé. Le gouvernement britannique argumente que les vétérans étaient suffisamment loin du centre des explosions et par conséquent à l’abri des effets nocifs du rayonnement. A l’heure actuelle, les associations de vétérans des essais nucléaires contestent cette affirmation et certains sont persuadés d’avoir servi de cobayes.
Bien avant les essais nucléaires, les membres de la bureaucratie militaire britannique savaient parfaitement bien que le personnel du programme d’expérimentations nucléaires risquait d’être exposé à des doses d’irradiation. Des pièces probantes dans les archives britanniques indiquent que l’un des buts des essais était d’étudier les incidences des détonations nucléaires « sur le personnel et l’équipement ».
Un exemple : le chef d’état-major britannique disposait d’un Comité de la politique de recherche du ministère de la défense sur les essais d’armes atomiques. Ce comité était chargé d’effectuer des recherches sur les applications militaires de l’énergie atomique. Une note de service de ce Comité, datée du 20 mai 1953, stipule que des séries « d’essais » doivent être incluses dans de futurs essais d’armes atomiques :
« La Marine requiert des informations concernant les effets de divers types d’explosions atomiques sur les navires, leur contenu et l’équipement. La Marine doit obtenir des informations détaillées sur les effets des divers types d’explosions sur l’équipement, le ravitaillement et les hommes avec ou sans protection ».
Une autre note de service de la RAF (Royal Air Force), datée du 29 novembre 1955, indique ceci :
« Pendant les essais de 1957, la RAF bénéficiera d’une expérience inestimable en matière d’utilisation des armes et pourra observer de près les effets des explosions nucléaires sur le personnel et l’équipement ».
En 1997, le gouvernement britannique a prétendu devant la Cour européenne des Droits de l’Homme qu’aucun être humain n’a jamais été utilisé dans des expérimentations d’armes nucléaires. Toutefois, en 2001, une chercheuse a découvert dans les Archives nationales australiennes des documents montrant que des expérimentations avaient pour but de connaître les effets de l’irradiation. Des hommes ont été sélectionnés pour des « essais de tenues vestimentaires » parmi le personnel militaire britannique, australien et néo-zélandais. Ces hommes ont marché, rampé ou ont été conduits à travers des zones de retombées trois jours après une expérimentation nucléaire à Maralinga.
Selon, Sue Rabbit Roff, chercheuse à l’Université de Dundee :
“On leur a demandé de porter un type de vêtement particulier et de ramper ou marcher à travers point zéro [l’endroit où la bombe a explosé] parfois quelques heures ou quelques jours après l’explosion d’armes atomiques à Maralinga. Le but était de déterminer si les vêtements offraient une quelconque protection aux matériaux radioactifs qui se trouvaient dans le sable et l’air ambiant dans lesquels ils travaillaient à ce moment là. ».